TRENTE-SEPT

 

Dans le golfe de Kossuth, les systèmes météo s’étaient calmés pendant que nous avions le dos tourné. Après avoir martelé la côte est pendant plus d’une semaine, la grosse tempête avait frappé l’extrémité nord de Vchira et s’était perdue dans l’océan Nurimono, au sud. Là, tout le monde pensait qu’elle mourrait dans les eaux glacées du pôle. Dans le calme qui s’en est suivi, il y avait eu une envolée de la circulation maritime, chacun essayant de rattraper son retard. Le Limite feu céleste est tombé au beau milieu de tout ça comme un dealer poursuivi dans un centre commercial bondé. Il a viré de-ci de-là, s’est blotti contre la masse du hameau flottant Pictures of the Floating World, et s’est amarré tranquillement aux docks bon marché au moment où le soleil commençait à baver sur l’horizon ouest.

Soseki Koi nous a retrouvés sous les grues.

J’ai repéré sa silhouette teintée par le soleil couchant depuis le chasseur de raies et l’ai salué d’un geste du bras. Il ne m’a pas répondu. Quand Brasil et moi l’avons retrouvé, j’ai vu comme il avait changé. Son regard portait une intensité, une lueur qui pouvait tenir autant des larmes que de la fureur retenue. Difficile à dire.

— Tres ? a-t-il demandé tout bas.

— Encore en convalescence, a répondu Brasil en indiquant le bateau. On l’a laissée avec… avec Elle.

— D’accord. Bien.

Les monosyllabes se sont transformés en silence général. Le vent a sifflé autour de nous, tirant les cheveux, piquant les sinus. À côté de moi, j’ai senti plutôt que vu se tendre le visage de Brasil. Comme un homme qui sonde sa blessure.

— On a entendu la nouvelle, Soseki. Qui est revenu, de ton côté ?

— Pas grand monde. Vidaura. Aoto. Sobieski.

— Mari Ado ?

— Désolé, Jack.

Le pilote du chasseur de raies est descendu à terre avec quelques officiers que je connaissais assez pour leur faire un signe de tête quand je les croisais. Apparemment, Koi les connaissait tous : ils se sont pris par l’épaule avec un rapide échange en stripjap, avant que le pilote reparte vers la capitainerie, les autres à sa suite. Koi s’est retourné vers nous.

— Ils vont rester à quai le temps de demander une réparation des moteurs grav. Il y a un autre chasseur de l’autre côté, des vieux potes à lui. Ils achèteront une proie fraîche à emmener à Newpest demain, pour les apparences. Pendant ce temps, on file à l’aube avec un des glisseurs de contrebande de Segesvar. C’est ce qu’on a pu organiser de plus proche d’une disparition.

J’ai évité de regarder Brasil en face. Au lieu de ça, j’ai examiné la structure du radeau urbain. Et surtout, j’étais enveloppé d’un soulagement tout égoïste. Virginia Vidaura faisait partie de la liste des survivants. Mais une petite partie diplo de mon esprit remarquait le flux des passants, les points d’observation ou de tir possibles.

— On peut leur faire confiance ?

Koi a hoché la tête. Il paraissait content de s’occuper avec les détails.

— La très grande majorité, oui. Le Pictures a été construit à Drava, et la plupart des actionnaires du bord sont les descendants des propriétaires de la coopérative d’origine. Leur culture est largement pro-quelliste ; donc une tendance à s’entraider, mais à ne pas s’occuper des affaires des autres si personne ne demande rien.

— Ah ouais ? Ça me paraît un peu utopique. Et l’équipage non associé ?

Le regard de Koi s’est assombri.

— Les nouveaux venus et l’équipage saisonnier savent sur quoi ils s’engagent. Le Pictures a une réputation, comme tous ces chasseurs. Ceux à qui ça ne plaît pas ne restent pas longtemps. La culture se transmet.

Brasil s’est éclairci la voix.

— Combien savent ce qui se passe ?

— Qu’on est ici ? Une dizaine. Pourquoi on est ici ? Deux, anciens des Brigades Noires. (Koi a scruté le chasseur.) Ils veulent tous les deux être là pour la Détermination. On a trouvé une planque dans les niveaux inférieurs de la poupe.

— Koi. (Je me suis inséré dans son champ de vision.) D’abord, il faut qu’on parle. Il y a une chose ou deux que tu devrais savoir.

Il m’a regardé un moment, ridé et insondable. Rien de ce que je dirais ne pourrait éteindre la faim dans son regard.

— Il faudra que ça attende, m’a-t-il répondu. Notre premier souci est de confirmer Son identité. Je serais heureux qu’aucun de vous ne m’appelle par mon nom avant que ce soit fait.

— Déterminer, ai-je repris. (La majuscule audible chaque fois qu’on parlait d’elle commençait à me courir.) Tu veux dire Déterminer, n’est-ce pas, Koi ?

Son regard a glissé de mon épaule pour se reporter au flanc du chasseur de raies.

— Oui, bien sûr.

 

On a beaucoup parlé des racines quellistes dans les classes inférieures. Notamment depuis que la principale architecte du mouvement est morte et donc indisponible pour les débats politiques, ce qui arrange tout le monde. Le fait que Quellcrist Falconer ait choisi de se bâtir une base de soutien chez les plus pauvres de Harlan a mené à une interprétation curieuse chez beaucoup de néoquellistes selon laquelle elle comptait pendant la Décolo créer un cadre dirigeant tiré exclusivement de cette base. Le fait que Nadia Makita elle-même soit issue d’une classe moyenne relativement privilégiée est savamment ignoré, et puisqu’elle n’a jamais atteint la moindre position gouvernante, la question capitale de qui va tout diriger quand les choses seront retombées ne s’est jamais posée. Mais cette contradiction intrinsèque survit au cœur de la pensée quelliste moderne, et il est préférable de ne pas soulever la question en compagnie de néoquellistes.

Donc, je n’ai pas fait remarquer que l’abri dans les profondeurs de Pictures of the Floating World n’appartenait à l’évidence pas à l’homme et à la femme cultivés qui nous y attendaient, tous deux anciens des Brigades Noires. Poupe inférieure, c’est le quartier le moins cher et le plus dur de n’importe quel radeau urb ou usine maritime, et personne ne choisit d’y vivre. Je sentais les vibrations des moteurs du Floating World s’intensifier à mesure que nous descendions, passant devant les quartiers les plus désirables au-dessus de la poupe. Le temps d’arriver dans l’appartement, c’était un grattement constant à l’arrière-plan. Meubles utilitaires, murs nus et bruts avec un minimum de décoration. L’occupant des lieux ne passait pas beaucoup de temps chez lui.

— Pardonnez ce cadre, a dit la femme d’un ton très urbain en nous faisant entrer. Ce ne sera que pour cette nuit. Et la proximité des moteurs rend toute surveillance presque impossible.

Son partenaire nous a indiqué des chaises autour d’une table en plastique bon marché fournie en rafraîchissements. Une théière chauffée, un assortiment de sushis. Très formel. Il a parlé pendant que nous nous asseyions.

— Oui, nous avons aussi moins de cent mètres à faire jusqu’à la trappe de maintenance de coque la plus proche, où on viendra tous vous récupérer demain matin. Le flotteur arrivera juste sous les étais, entre les quilles six et sept. Vous pourrez descendre tout droit. (Un geste pour Sierra Tres.) Même blessée, vous ne devriez avoir aucun problème.

Il y avait dans tout cela une assurance répétée, mais à mesure qu’il parlait, son regard ne cessait de revenir vers la femme dans le corps de Sylvie Oshima, puis se détournait d’un coup. Koi faisait à l’origine la même chose quand nous l’avions fait descendre du Limite feu céleste. Seule la femme des Brigades Noires paraissait contrôler son regard et son espoir.

— Alors, a-t-elle dit doucement. Je suis Sto Delia. Voici Kiyoshi Tan. Pouvons-nous commencer ?

La Détermination.

Dans la société moderne, c’est un rituel aussi courant que les fêtes de reconnaissance parentale pour saluer une naissance, ou les remariages pour cimenter des couples récemment réenveloppés dans leur ancienne relation. Entre la cérémonie stylisée, les réminiscences « et tu te rappelles quand », la Détermination varie dans sa forme et sa rigidité d’un monde à l’autre, d’une culture à l’autre. Mais sur chaque planète où je suis allé, c’est un aspect très respecté et fondateur dans les relations sociales. En dehors de coûteuses procédures psychographiques, c’est la seule façon dont nous pouvons prouver à nos amis et nos parents que, malgré la chair que nous portons, nous sommes qui nous affirmons être. La Détermination est la fonction sociale essentielle qui définit la continuité identitaire dans notre époque moderne, aussi vitale pour nous que des fonctions primitives comme les bases de données de signatures ou d’empreintes digitales pour nos ancêtres.

Et là, je ne vous parle que des citoyens ordinaires.

Pour les héros quasi mythiques revenus – peut-être – d’entre les morts, la cérémonie est cent fois plus prégnante. Soseki Koi tremblait de façon visible en s’asseyant. Ses collègues portaient des enveloppes plus jeunes, et cela se voyait moins, mais en les regardant avec des yeux de Diplo, on retrouvait la même tension dans leurs gestes hésitants et outrés, leur rire trop vite éteint, le tremblement occasionnel de leur voix quand elle montait d’une gorge sèche. Ces hommes et cette femme, autrefois membres de la force de contre-insurrection la plus crainte de toute la planète, entrevoyaient soudain un espoir dans les cendres de leur passé. Ils étaient face à la femme qui affirmait être Nadia Makita, et tout ce qui leur avait un jour paru important pesait dans la balance. Cela se lisait dans leur regard.

— C’est un honneur, a commencé Koi avant de s’éclaircir la voix. C’est un honneur de parler de ces choses…

De l’autre côté de la table, la femme dans l’enveloppe de Sylvie Oshima le regardait sans broncher. Elle a répondu à une de ses questions détournées avec un assentiment brusque, en a ignoré une autre. Les deux autres membres des Brigades sont intervenus, et elle se tournait chaque fois légèrement pour leur faire face, avec un geste d’invite. Je me suis senti glisser dans le rôle de spectateur tandis que le premier tour d’amabilités s’achevait et que la Détermination prenait de l’élan. La conversation s’est faite plus dynamique, passant rapidement des événements récents à une longue et sombre rétrospective politique puis un rappel de la Décolonisation et des années qui l’avaient précédée. Le langage régressait tout aussi vite, de l’amanglais contemporain à un dialecte japonais inhabituel entrecoupé de stripjap vieilli. J’ai regardé Brasil et haussé les épaules quand le sujet et le contenu syntaxique sont devenus trop éloignés pour nous.

Ça a duré plusieurs heures. Les moteurs laborieux du radeau entretenaient un tonnerre sourd dans les murs autour de nous. Le Pictures of the Floating World continuait son chemin. Nous écoutions.

— … fait réfléchir. Une chute de n’importe laquelle de ces corniches, et on se retrouve en compost dispersé sur > > la marée descendante ? < < Aucun programme de récupération, aucune assurance de réenveloppement, pas même de dédommagement à la famille. C’est une > > rage ? < < qui commence dans les os et…

— … rappelez quand vous en avez pris conscience ?

— … un des articles de mon père sur la théorie coloniale…

— … jouer à > > ? ? ? ? ? < < dans les rues de Danchi. On le faisait tous. Je me souviens d’une fois, la > > police de rue ? < < a essayé de…

— … réaction ?

— Les familles sont comme ça – ou du moins ma famille était toujours > > prise dans ? ? ? ? ? < < une invasion de slictopodes…

— … même quand vous étiez jeune, n’est-ce pas ?

— J’ai écrit tout ça à peine sortie de l’adolescence. J’ai du mal à croire qu’on l’ait imprimé. J’ai surtout du mal à croire que des gens aient > > donné du vrai argent/consacré du temps précieux à ? < < toutes ces > > ? ? ? ? ? < <.

— Mais…

— Vraiment ? (Haussement d’épaules.) Je n’avais pas cette impression en > > y repensant/réfléchissant < < avec du > > sang sur les mains ? < < sur la base du > > ? ? ? ? ? < <.

De temps en temps, Brasil ou moi nous levions et faisions du thé dans la cuisine. Les vétérans de la Brigade Noire nous remarquaient à peine. Ils étaient concentrés, perdus dans le déferlement d’un passé soudain réincarné de l’autre côté de la table.

— … rappelez qui a pris cette décision ?

— Bien sûr que non. Votre > > chaîne de commandement/ respect < < ne valait pas un clou et…

Éclats de rire tout autour de la table. Mais leurs yeux étaient trop brillants.

— … et il commençait à faire trop froid pour une campagne de furtivité. Les infrarouges nous auraient révélés comme…

— Oui, c’était presque comme…

— … Millsport…

— … mieux leur mentir et leur dire qu’on avait une chance ? Je ne pense pas.

— Il aurait fallu une centaine de kilomètres avant que…

— … et des réserves.

— Odisej, si je me rappelle bien. Il aurait fait un > > ? ? ? ? ? < < dernier carré de résistance juste sous le…

— … sur Alabardos ?

Longue pause.

— Ce n’est pas clair, ça me paraît un peu > > ? ? ? ? ? < <. Je me souviens d’un hélicoptère ? On allait à l’hélicoptère ?

Elle tremblait légèrement. Une nouvelle fois, ils se sont écartés du sujet comme des razailes surpris par un tir de fusil.

— … quelque chose sur…

— … essentiellement une théorie réactive

— Non, sans doute pas. Si j’examinais les autres > > modèles ? < < …

— Mais n’est-ce pas axiomatique que > > la lutte ? < < pour le contrôle du > > ? ? ? ? ? < < cause…

— Ça l’est ? D’après qui ?

— Eh bien… (Hésitation gênée, échange de regards.) D’après vous. En tout cas, vous avez > > avancé/admis ? < < que…

— Mon cul, oui ! Je n’ai jamais dit qu’un changement de politique convulsif était la > > clé ? < < d’un meilleur…

— Mais Spaventa affirme que vous souteniez…

— Spaventa ? Ce putain d’escroc ? Il respire encore, lui ?

— … et vos écrits sur la démodynamique montrent…

— Écoutez, je ne suis pas une putain d’idéologue, d’accord ? Nous étions face à > > une baleine à bosse dans les vagues ? < < et il fallait…

— Donc > > ? ? ? ? ? < < n’est pas la solution à > > ? ? ? ? ? < < et réduire la > > pauvreté/ignorance < < entraînerait…

— Bien sûr que oui. Je n’ai jamais affirmé le contraire. Qu’est-ce qu’il est devenu, Spaventa ?

— Euh, eh bien… il enseigne à l’université de Millsport…

— Vraiment ? Ah la petite merde…

— Hem. Nous pourrions peut-être aborder une > > version/vue < < des événements qui repose moins sur > > ? ? ? ? ? < < que les théories de > > recul/fronde < < …

— Très bien, si ça tient la route. Mais vous pourriez me donner un seul > > exemple probant ? < < pour soutenir ces affirmations ?

— Euhhh…

— Exactement. La démodynamique, ce n’est pas > > du sang dans l’eau ? < <, c’est une tentative de…

— Mais…

Et ainsi de suite, jusqu’à ce que dans un fracas de meuble bon marché, Koi se lève soudain.

— Ça suffit, a-t-il bougonné.

Les autres, moi compris, ont échangé des regards. Koi a fait le tour de la table, et son vieux visage était tendu d’émotion quand il a regardé la femme assise là. Elle l’a regardé sans aucune expression.

Il lui a tendu les mains.

— Je vous ai… dissimulé mon identité jusqu’à maintenant, pour le bien de… notre cause… notre cause commune. Mais je suis Soseki Koi, du commandement de la 9e Brigade Noire, front Safran.

Le masque sur le visage de Sylvie Oshima s’est liquéfié. Remplacé par une sorte de sourire.

— Koi ? Koi la Tremblotte ?

Il a opiné du chef, les lèvres serrées.

Elle a pris ses mains tendues, et il l’a levée à côté de lui. Face à la table, il nous a regardés l’un après l’autre. On voyait les larmes dans ses yeux, on les entendait dans sa voix quand il a parlé.

— C’est Quellcrist Falconer, a-t-il dit. Dans mon esprit, il n’y a plus la moindre place pour le doute.

Puis il s’est retourné et l’a prise dans ses bras. Des larmes soudaines ont brillé sur ses joues. Il avait la voix rauque.

— Nous vous attendions depuis si longtemps. Depuis si longtemps

Furies Déchaînées
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